Et la rentrée politique?

Ce n’est pas encore la rentrée parlementaire ni le début de la campagne électorale en vue des élections fédérales prévues pour juin 2003. Et c’est le moment choisi par le ministère fédéral de l’emploi (Division de l’égalité des chances ) pour publier une étude sur «Les femmes et la politique» consacré au profil des candidates aux élections du 13 juin 1999. Cet ouvrage fournit des données statistiques au sujet des conditions utiles et favorables à une élection, par exemple, l’appartenance à une famille traditionnellement intéressée à la politique et ayant compté des mandataires. La situation familiale des candidates est également comparée à celle de la population générale des femmes; elles sont plus nombreuses que le «tout venant des femmes» à vivre seules et à ne pas avoir d’enfants, par exemple. L’existence d’un groupe féminin dans le parti auquel appartient une candidate et sa participation à ce groupe sont des éléments favorisants. L’existence de formation scolaire et académique des candidates est supérieure à la moyenne.

Une autre question abordée dans l’étude est l’intérêt porté par les candidates aux questions concernant les femmes au cours de leur campagne électorale. Ce sujet est intéressant pour réfuter l’argument de ceux et de celles qui disent que les femmes «arrivées» se désintéressent de la situation de l’ensemble des femmes, en particulier des femmes des milieux défavorisées.

L’ouvrage, nous l’avons dit, compare le mode de vie des candidates et celui de Madame Tout-le monde mais il serait intéressant de comparer le mode de vie et la situation familiale des candidats et des candidates (mariage, enfant, etc. ). On découvrirait peut-être alors que les hommes trouvent autour d’eux davantage l’appui des personnes (conjoint, collatéraux, enfants, etc. ) qui au contraire freinent les légitimes ambitions des femmes qui ne répondent pas au fameux schéma d’altruisme inné des femmes qu’a décrit, il y a bien longtemps la doctoresse Gina Lombroso.

Nous n’avons pas épluché la presse et les médias qui, à l’occasion de ce livre, ont commenté le sujet, mais nous avons relevé quelques commentaires. Certains commentateurs ont mis l’accent sur la situation privée et familiale de ces femmes en politique.

«Des femmes plutôt seules et nettement plus qualifiées», titre «Le Soir» du 7 août 2002 «Mœ ders in de politiek, een bedreigde minderheid», (des mères en politique, une minorité menacée) écrit «De Morgen» du 10 août 2002 qui avait publié, le 7 août, des interviews: «Politiek en mœ derschap blijven mœ ilijk te verzœ nen» (la maternité et la politique restent difficilement conciliable).

On se rappellera la mercuriale contre les jeunes magistrates que prononça jadis un procureur générale qui compara une femme enceinte à une frégate désemparée. En voyant dans «De Morgen» du 10 août 2002 le titre qui surmonte une caricature illustrant un article: «De papfles in het parlement» (le biberon au parlement) montrant une chaise vide à une table autour de laquelle seuls des hommes sont assis. Le parlementaire absent est-il nécessairement une femme?

La misogynie en politique ne règne pas seulement chez nous. Mme O. R. attire notre attention sur une nouvelle qui nous vient de Corée du Sud: une femme nommée première ministre le 11 juillet 2002 par le président de la république a été refusée par le parlement.

Le journal «L’Echo» du 1er août 2002 conclut son article par une déclaration que nous pourrions écrire:«C’est surtout une femme en pays machiste».

Nous terminerons cette rubrique par un témoignage.

Réagissant à notre appel, Mme Claire Bihin-Jourdain évoque sa candidature aux élections communales à Uccle. Les seules dépenses personnelles qu’elle a pu se permettre s’élevèrent à 4000 francs, somme qu’elle aurait pu consacrer à un nouveau manteau; elle ne fut pas élue. Elle apprit que son colistier et concurrent élu avait, lui, pu dépenser 300. 000 francs, venant de sa propre personne ou de la solidarité de ses amis.

Un souvenir de vacances

On peut faire du tourisme et être en vacances mais, à chaque pas, à tous les tournants, on peut penser au féminisme. Nous invitons tous nos lecteurs et toutes nos lectrices à imiter celle qui nos écrit ce qui suit:

Je suis retournée à Aigues-Mortes, dans cette ville où j’ai passé une partie de ma jeunesse; j’y ai revu la Tour de Constance dans laquelle Marie Durant et ses compagnes subirent une détention de plusieurs décennies en raison de leur foi religieuse. J’y ai revu l’inscription (REGISTER) qui figure sur la margelle du puit et que j’ai toujours voulu lire comme le mot «RÉSISTER» pensant que le résistance des femmes précède leur rébellion.

J’ai surtout penser que, même en période de persécution, c’est aux femmes que l’autorité interdit de prendre la parole dans les assemblées et qu’il fallut encore deux siècles pour qu’elles soient admises dans la hiérarchie religieuse».

Ordination de femmes-prêtres

Un groupe de théologiennes appartenant à l’Église catholique romaine a récemment reçu l’ordination des mains d’un évêque (lui-même dissident) dans des conditions d’extraterritorialité. Or cette Eglise s’obstine à refuser ce sacrement aux femmes, même si elles ont les compétences requises pour la fonction. Ces femmes ont subi l’excommunication, la sanction majeure. Elles ont décidé de suivre toutes les voies du droit pour obtenir satisfaction.

En 2002 tout se passe comme si la volonté de servir une cause au degré le plus élevé était pour les hommes le signe d’un dévouement compatible avec la modestie mais était, dans le chef des femmes, l’expression d’une ambition démesurée et même d’une prétention inadmissible

Conférence sur la base de donnée DIGMA

Nous vous invitons, ainsi que les personnes de votre entourage familial et professionnel à la conférence de Madame Ariane Dierickx, licenciée en Histoire Contemporaine et directrice adjointe d’Amazone au sujet de DIGMA (Database of Instruments for Gender Mainstreaming), la banque de données sur les questions de genre, que nous organisons le jeudi 24 octobre 2002 à 19h dans une des salles d’Amazone, rue du Méridien, 10à 1210 Bruxelles

Le comité espère que nombreuses seront les personnes qui y participeront et qui contribueront ainsi à faire progresser l’émancipation économique de la travailleuse.

L’oratrice, outre les titres mentionnés plus haut, a une très sérieuse formation en informatique; la gestion de la banque de données DIGMA et ses fonctions à Amazone, lui donnent une grande compétence pour aider les personnes qui désirent s’informer sur les questions de genre dans leur ensemble, tant théoriques que pratiques.

Petit lexique

  • «Database» signifie «banque de données».
  • Le mot «sexe» concerne les caractéristiques physiques et biologiques des personnes.
  • Le mot «genre» concerne la situation des personnes des deux sexes dans la société.
  • L’expression «MAINSTREAMINGDU GENRE» peut être traduite comme l’intégration de la notion de genre dans toutes les questions.
  • Le terme «EMPOWERMENT» concerne la prise de pouvoir sur soi-même et sur les circonstances et la société, ainsi que l’acquisition d’un pouvoir de décision.

Un coup de projecteur sur une profession: médecin

Le retentissement dans les médias qu’a eu la publication des statistiques concernant cette profession nous amène à en parler assez longuement. En effet, la presse n’a pas manqué d’en faire de grands titres, comme La Libre Belgique des 3 et 4 août 2002 avec «Dix fois plus de femmes médecins qu’il y a trente ans» en première page.

Ce que l’on souligne dans les commentaires, ce n’est pas seulement l’accroissement de la proportion des femmes dans le métier, mais leur pénétration dans tous les secteurs et spécialisations; mais on souligne aussi qu’elles sont majoritaires à commencer les études ou à exercer les spécialités peu rémunérées (dermatologie ou anatomie pathologique par exemple), qui ont un rendement financier modeste.

Observation un peu étrange: elles sont loin d’être majoritaires en obstétrique?Quant à la hiérarchie dans l’enseignement ou à l’hôpital, il y a certes des femmes depuis plus de soixante ans, -comme le rappelle dans «semper» (revue médicale) la professeure M. De Rood, qui fut en son temps désignée comme «femme de l’année»-, mais leur proportion est moindre qu’à la base.

Sans doute ne manquera-t-on pas de dire qu’ «il faut du temps!». On ne manque pas non plus de souligner que les femmes auraient tendance à consacrer plus de temps à chaque prestation que les hommes, et à se contenter d’horaires de travail moins chargés, ce qui, à plus ou moins long terme, aurait pour effet de créer une pénurie de prestataires.

Autrement dit, «la place des femmes» alimente l’argumentation dans les disputes au sujet des diverses conceptions de la pratique professionnelle. Enfin les femmes interviewées déclarent leur gratitude aux membres de leur entourage qui les libèrent des charges ménagères et familiales.

Témoignages

Quelques témoignages retracent des situations auxquelles des femmes médecins ont dû faire face à une époque assez récente:

  • «A l’Université de Liège, à cette époque, le professeur B. était titulaire de la chaire d’obstétrique. C’était la clinique de manœuvres obstétricales; dans la salle pleine, les étudiantes étaient clairsemées; l’éminent pédagogue, voulant démontrer un exercice difficile mais ignorant manifestement la longue tradition des remarquables obstétriciennes qui l’avaient précédé auprès des parturientes, brandissait un forceps ou quelque autre instrument en proférant superbement que les femmes peuvent bien être accoucheuses, mais qu’elles ne peuvent pas être médecins accoucheurs. Et de fait il n’y avait aucune assistante dans son service. Nous les quelques étudiantes présentes, protestâmes en silence en frottant les pieds sur le sol». Docteur X
  • «C’était pendant la guerre 40-45, il y avait des bombardements sur Bruxelles. Pour renforcer leurs services dans ces circonstances, il fut décidé par les chefs de service que les stagiaires devraient au plus tôt, dans ce cas, rejoindre l’hôpital. Quand cette décision nous fut communiquée, et que ledit chef de service eut quitté le local, quelques étudiants en mal de «galanterie» déclarèrent que les filles devraient être dispensées de cette obligation. Sentant bien l’astuce, et la volonté que nourrissaient quelques machos (le terme n’était pas utilisé à cette époque) de se réserver le bénéfice d’une expérience professionnelle supplémentaire, nous, les filles, fûmes unanimes à refuser cette «dispense» et l’affaire en resta là». Docteur N.
  • «Je venais d’obtenir mon diplôme de médecine et mes études avaient été brillantes; Ce vieux médecin, ami de la famille, me félicite, me disant: «vous pouvez envisager de devenir adjoint des hôpitaux». Je ressentis immédiatement la restriction! Je me demande encore s’il savait que la réussite professionnelle et sociale dépend en (grande) partie des attentes manifestées par l’entourage et la société.» Docteur Z.
  • Sans remonter à ces époques relativement lointaines, nous lisons, dans une revue médicale de cette année 2002, le témoignage d’une consœ ur qui explique que,»spécialisée en chirurgie, elle ne trouva pas d’emploi dans l’hôpital de sa région et dut se contenter d’avoir à pratiquer la «petite chirurgie» en privé».

En quête de travail

L’Union Européenne veut mener une politique d’emploi et réaliser la mise ou le maintien au travail de personnes actuellement sans emploi, tandis que divers secteurs d’activité sont, chez nous aussi, à la recherche de travailleurs – et donc également des travailleuses.

Le Conseil supérieur de l’Emploi vient de publier son rapport annuel et a examiné notamment la structure de la population féminine du pays. Il constate que douze pour cent des femmes âgées de 25 à 44 ans ont des tâches ménagères et familiales comme principale occupation, et que leur degré de qualification est faible.

Entre 40 et 45 ans, 25 pour cent des femmes ayant peu de qualifications sont au foyer, alors que celles qui ont une formation moyenne ou supérieure ne sont que 11 pour cent.

Une campagne est menée par le ministère fédéral pour démontrer que les femmes «conviennent» aux emplois dits masculins (notamment affiches dans le métro), et SOFFT -Service d’Orientation pour Femmes à la recherche d’une Formation ou d’un Travail- a mené l’enquête à Liège et publié une brochure intitulée: «pourquoi pas elles dans ces métiers-là?».

Dans des secteurs où l’on cherche du personnel, les employeurs font parfois appel à un groupe social précis, mais nous avons remarqué que, dans une interview à la radio RTBF, le chef d’état-major de l’armée a ouvertement fait appel aux personnes d’origine allochtone, mais n’a pas une seule fois parlé des femmes dans les fonctions militaires. C’est à croire que les femmes sont des êtres transparents!

Mais l’on peut dire qu’il y a des femmes au travail partout; parmi les dix pour cent de salariés travaillant régulièrement le dimanche (santé, horéca, etc?), il y a une proportion égale d’hommes et de femmes. Et, le samedi, il y a davantage de femmes au travail (25%) que d’hommes (20%), notamment en raison de leur présence dans le secteur de la distribution.

Étude de l’UCL sur l’accès des femmes à l’Université

Cette étude, nous dit-on, souligne l’incidence de la situation sociale et financière des familles, et celle du niveau d’études des parents. Soulignons bien le mot «parents», car dans les commentaires verbaux qui ont été faits à la radio, et lors d’une séance de rentrée, cette expression est devenue: «niveau d’études du père», ce qui lors de ladite rentrée académique a suscité quelques grimaces parmi les auditrices présentes. Une fois de plus, c’est le père qui est présenté comme celui qui donne un standing à la famille, alors qu’on ne manque pas d’éloges pour souligner le rôle de la mère dans l’avenir des enfants quand il s’agit de l’inciter à renoncer à «être aussi à elle-même».

Dans le même temps, le journal De Standaard souligne que, dans l’enseignement fondamental, il n’y a plus qu’un homme sur cinq enseignants.

Conférence sur l’empowerment

Nous vous invitons, ainsi que les personnes de votre entourage familial et professionnel à la conférence de Madame Lisette Caubergs, consultante chez ATOL (Aangepaste Technologie in OntwikkelingsLanden) sur un sujet à la fois permanent et d’actualité: l’empowerment, conférence que nous organisons le jeudi 28 novembre 2002 à 19h dans une des salles d’Amazone, rue du Méridien, 10à 1210 Bruxelles

L’Empowerment, qui évoque l’acquisition de l’assurance personnelle, l’affirmation de soi-même, la volonté de participer à toutes les décisions individuelles et collectives, le refus d’une domination… est d’une importance capitale dans la lutte contre la discrimination du sexe/genre qui affecte les femmes.

Ces considérations ont sans doute une valeur particulière, à l’heure où l’on observe des changements multiples (ou qu’on y participe), et que des échéances précises se dressent à l’horizon..

Le comité espère que nombreuses seront les personnes qui y participeront et qui contribueront ainsi à faire progresser l’émancipation économique de la travailleuse. Le débat qui suivra l’exposé pourra se faire en français et en néerlandais. Entrée gratuite.

Éditorial

La lecture récente d’un document des Nations Unies (CEDAW/sp/2002/2) intitulé «convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes», nous amène à faire quelques réflexions générales sur l’état d’avancement de la cause féministe dans les lois, les faits et les mentalités. Nous nous bornerons à l’examen des passages de ce rapport qui concernent la Belgique:

  • La Belgique maintient sa réserve concernant la législation sur le mariage. Alors qu’en 1976 la réforme de cette institution consacrait l’égalité des époux, une concession majeure était faite aux antiféministes par le législateur: les époux mariés antérieurement sous le régime légal fondé sur la sujétion de l’épouse à son mari pouvaient, par une déclaration expresse, maintenir cette situation malgré la réforme.

On dira sans doute -une fois de plus- que cette situation était «choisie» ou «acceptée», selon la formule consacrée, par la femme qui signait le document. Nous n’avons fait aucune recherche pour savoir combien de ménages ont, dans les délais requis, fait cette démarche, et combien il en reste aujourd’hui. On peut penser que leur nombre a été modeste, puisqu’il s’agissait de faire une démarche et d’exposer des frais. D’autre part, par l’évolution du temps et la disparition naturelle des intéressés, ce nombre ne peut que décroître.

Mais on continue à éprouver de l’agacement -et c’est un euphémisme-, en constatant ce souci de ménager les tenants de l’antiféminisme.

  • Tous les Etats parties à la convention ont le droit de faire des objections et des observations sur les réserves faites par d’autres Etats , réserves ayant souvent comme effet de vider de leur substance les articles considérés de la convention.
  • D’autres pays, notamment des pays de l’Union Européenne comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou la Suède, font des objections ou des observations tout en déclarant que lesdites objections restent sans effet sur leurs relations diplomatiques avec les pays incriminés.

Devant une telle situation, on doit se réjouir de constater que le Lobby Européen des Femmes (LEF) ait souligné, dans une résolution adoptée à Bruxelles en septembre 2002, le fait qu’on observe une régression du droit des femmes dans le monde. Donc, appel à la vigilance.

Création d’un Institut du Genre

La Chambre fédérale des Représentants a récemment adopté un projet de loi, déjà approuvé par le Sénat, sur la création d’un institut du genre consacré à la lutte contre les discriminations du sexe/genre.