HOMMAGE À ADÈLE HAUWEL

Avant de vous parler d’Adèle Hauwel, je voudrais tout d’abord remercier la Présidente du Sénat qui a accepté de nous recevoir dans ses locaux.

Je profite de l’occasion pour exprimer notre joie concernant la nomination d’une femme à la présidence du Sénat et ce, pour la première fois de notre histoire; et pas n’importe quelle femme puisque madame Anne Marie LIZIN a toujours mené un réel combat pour défendre l’égalité femme-homme; je sais qu’Adèle et elle s’appréciaient.

Je remercie aussi le Comité d’avis pour l’égalité des chances et spécialement sa vice-présidente madame Marie-Josée LALOY pour nous avoir soutenu dans notre projet, l’avoir «marrainé» ainsi que la secrétaire du Comité madame HAENEN pour toute l’aide concrète qu’elle a fournie.

Adèle HAUWEL est née en 1920 et a été influencée par le milieu dans lequel elle vivait et par l’éducation reçue. Ces deux facteurs influencent encore et toujours la construction d’une personne.

Dans son cas, ils ont tous les deux une influence positive étant donné que sa mère et sa soeur aînée l’entraînent parfois à des réunions publiques ou dans des «cercles de réflexion» et mettent à sa disposition de nombreuses revues et livres amenant cette réflexion; elle se passionnera par exemple pour les récits des aventures de femmes exceptionnelles qui partirent à la découverte de l’Afghanistan comme Ella Maillart ou accomplirent un tour du monde en bateau comme Virginie Herriot.

A 15 ans, la lecture de «Fécondité» d’Emile Zola laisse Adèle scandalisée d’une telle utilisation du corps des femmes; la même année elle rencontre lors d’une réunion publique Louise De CRAENE-Van DUUREN, fondatrice du groupement belge de la Porte Ouverte.

Durant la seconde guerre mondiale, elle participe très activement à la résistance tout en ayant décidé de suivre des études de médecine.

La trempe d’Adèle se manifesta tout au long de sa vie au bénéfice de la défense de son idéal.

La guerre finie, elle ouvre un cabinet médical avec l’intention d’aider les femmes en leur offrant la possibilité d’avoir recours à un moyen de contraception mais aussi à la contraception d’urgence du «lendemain».

Par la suite elle les oriente aussi si nécessaire vers des cliniques pratiquant des avortements ou vers des médecins acceptant de pratiquer des déflorations artificielles pour celles qui n’admettaient pas qu’un homme se rengorge ou vive un sentiment de fierté et ce, qu’il l’étale ou non, d’avoir «eu» une vierge.

Via sa profession elle avait aussi trouvé le moyen d’aider les plus démunis en ne leur faisant pas payer leur consultation mais aussi de conseiller et de soutenir les prostituées qui voulaient sortir de leur enfer.

Parallèlement, avec les membres du comité P.O. de l’époque – mais aussi avec les sections européennes de P.O. développées principalement en Angleterre et au Danemark – elle pratique une veille continue quant aux écrits, aux publications journalistiques, aux prises de position des organes officiels tant belges qu’étrangers et particulièrement ceux des Nations Unies.

Elle constitue ainsi un fond de documentation, souvent sollicité, et qui se retrouve en partie maintenant au CARHIF.

Cette veille permanente lui permettait ainsi d’être constamment «sur la balle» pour nous informer, écrire dans le bulletin ou proposer des actions de visibilité, de lobbying exprimant le mécontentement des adeptes de l’égalité.

Il va sans dire que tout son temps libre y est consacré.

Se calquant sur l’évolution de la société, des mentalités et des droits, elle se battit d’abord pour l’égalité des droits notamment en matière de droit civil avec, entre autre, Georgette CISELET et Stella WOLF.

Elle pratiqua aussi une longue lutte avec d’autres instances pour obtenir le droit à l’égalité de rémunération qui a finalement été concrétisé par l’article 119 du Traité de ROME devenu l’article 141 du Traité d’Amsterdam et par la Directive du 10 février 1975.

Bien qu’en droit, l’égalité soit actuellement assurée, une série de discriminations indirectes et le système de classification des professions ont perpétué une inégalité de fait dans les salaires mais aussi en matière de carrière.

Une enquête toute récente menée par un Secrétariat social témoigne que dans le secteur privé, en prenant en compte le seul salaire fixe, les femmes continuent à gagner moins que les hommes à compétence égale et cet écart grandit avec l’âge et le niveau de fonction:

  • entre 25 et 29 ans les femmes gagnent un salaire brut inférieur de 3,1% de celui des hommes;
  • pour les plus de cinquante ans la différence atteint 9,6%;
  • pour les fonctions de direction, cadres supérieurs et moyens elle atteint 9,2 %;

nous voyons donc comment l’âge et le niveau dans la carrière peuvent s’interconnecter.

Pendant de longues années, son combat principal et celui de la P.O. furent dirigés contre l’interdiction du travail de nuit faite aux femmes.

Partant du principe que toute législation protectrice ou dite telle, datant d’ailleurs parfois d’une époque révolue (ainsi en allait-il de l’interdiction de soulever des charges alors que des clarks et autres engins modernes de manutention avaient fait leur apparition) était une entrave au libre accès à l’emploi ou à un travail bien rémunéré pour les femmes (primes horaires), elle argumente inlassablement pour leur laisser au moins le choix et la possibilité d’y accéder en cas de besoin, besoin financier car effectivement il n’est un secret pour personne que actuellement la paupérisation et l’état de précarité se féminisent de plus en plus.

Le travail de nuit étant peu recommandé pour tout un chacun, les débats furent longs et passionnels mêlant ONG et instances européennes comme l’OIT et les amenant à prendre position.

Finalement le travail de nuit a été interdit pour tout le monde entre 20h et 06h avec une série de dérogations s’appliquant indistinctement aux travailleurs qu’ils soient masculins ou féminins à condition qu’ils ou elles aient atteint l’âge de 18 ans.

Elle disait aussi: (lui redonner ici l’occasion d’exprimer ses idées en public est une manière de lui rendre hommage car sur son lit d’hôpital elle regrettait de n’avoir pas eu assez de temps pour écrire des pamphlets ou simplement un livre dénonçant une série de discriminations indirectes parfois insidieuses et reliquats de machisme ou d’attitudes hypocrites; elle considérait que celles-ci essayent sur la base du rôle traditionnel des femmes et de leur éducation au dévouement d’éloigner ces dernières de certains types de métier, d’horaires de travail ou d’une durée de carrière suffisante leur permettant d’entrevoir des possibilités de promotion et par là une meilleure pension de retraite), ainsi elle disait donc par exemple que les mesures de protection de la maternité ne correspondaient pas nécessairement au souhait ou à la physiologie de «toute une chacune».

Obliger une femme en congé de maternité à prester celui-ci jusqu’au dernier jour alors qu’une opportunité d’emploi se présente, à saisir immédiatement, ou bien qu’assister à une réunion professionnelle qui peut être déterminante pour obtenir une promotion est fixée trois ou quatre jours avant la fin du congé légal – alors que cette femme est physiquement capable d’y faire face – la pénalise. (sauf d’y répondre à ses risques et périls et à condition que l’employeur soit d’accord!).

Elle regrettait aussi une autre protection, concernant les travailleuses enceintes et celles qui allaitent, leur interdisant d’effectuer des heures supplémentaires; celle-ci peut les pénaliser alors que la législation prévoit qu’y sont autorisées les personnes occupant un poste de confiance ou celles exerçant une fonction dirigeante mentionnée dans la législation.

Bien que la législation interdise aux employeurs, lors d’un entretien de recrutement, de poser des questions concernant une éventuelle grossesse, ils le font dans certains cas allant même jusqu’à demander aux femmes leur intention de maternité future.

Elle insistait également sur le fait que les rôles traditionnellement considérés comme féminins, l’éducation, la publicité et le regard des autres en imposant une image de et à la femme, mettent en avant l’accent sur son corps et son rôle de séduction, freinant considérablement le sérieux que l’on peut attribuer au travail de la femme et à l’image de celle-ci comme travailleuse à part entière, dans son milieux de travail.

Tout dernièrement une thèse de doctorat néerlandaise a fait du bruit dans le secteur des ressources humaines en Belgique. Selon le chercheur, auteur de cette thèse, l’attitude sexuelle serait aussi un critère de recrutement; les recruteurs sont prêts à admettre que les clichés sur l’apparence physique ont eu un effet perturbateur sur l’embauche dans plus de 8 % des cas.

INDÉPENDANCE ÉCONOMIQUE? INDÉPENDANCE ÉCONOMIQUE… cette condition est nécessaire et même vitale pour les femmes en vue de se protéger d’éventuels imprévus dans leur parcours de vie (exemple: divorce, abandon, violence conjugale?) c’était toujours son credo et c’est encore celui de la P.O. actuellement.

VIGILANCE, VIGILANCE rien n’est jamais tout à fait acquis répétait-elle à juste titre.

Marie-Christine EXSTEYL


Appel à candidatures

L’assemblée générale annuelle du Groupement belge de la Porte Ouverte aura lieu en février 2005.

Le Comité rendra compte de sa gestion aux membres qui procéderont à l’élection de membres du comité.

Les candidatures accompagnées de l’acceptation écrite des candidat(e)s), doivent être présentées par écrit par au moins trois membres du Groupement et doivent parvenir au siège social (Boulevard général Jacques, 61, 1050, Bruxelles) avant la mi janvier 2005.

Le comité peut compter jusqu’à 15 membres.

On remercie chaleureusement les personnes qui manifesteront leur intérêt pour le Groupement en participant à cette procédure et celles qui s’engageront à travailler dans le comité.

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