La femme comme question politique

En lien avec l’actualité, et bien que le verdict populaire n’ait pas soutenu les hypothèses de Françoise Héritier, il est intéressant de réfléchir à ce que l’anthropologue écrivait. Celle-ci avait trois convictions quant à la nécessité d’avoir une femme (progressiste) à la tête de la France.

La première est que la question du rapport des sexes est une vraie question politique centrale: «Le modèle archaïque régnant encore en ce domaine nous vient du Paléolithique et a été mis en place par la pensée symbolique… en des temps qui ignoraient d’autres clivages sociaux que celui-là, par des chasseurs collecteurs vivant sur la nature, sans réserves alimentaires ni propriétés à défendre… Ce modèle hiérarchique de pouvoir où les femmes sont mineures et inférieures, est à l’origine de tous ceux qui sont apparus par la suite entre porteurs de couleurs différentes de peau, de castes, de classes sociales… il est le modèle de tous les racismes»

La seconde conviction est que «dans le rapport des sexes, les trois marqueurs dont souffrent les femmes sont la privation du droit de décider de ce qu’il advient de leur corps, la privation de l’accès au savoir et celle de l’accès aux fonctions de l’autorité. Ces marqueurs sociaux permettent la concrétisation et la survie du système conceptuel touchant à la reproduction… Ce modèle est présenté par tous les États qui refusent l’égalité entre les sexes comme un choix culturel spécifique opéré entre diverses possibilités, ce qui est faux: le modèle est universel et nous nous en sommes péniblement et progressivement extirpés que depuis peu, notre exemple me pousse à penser que tous les autres peuples ont la capacité de parcourir le même chemin intellectuel. Mais nous devons pour cela connaître ce chemin et récuser le relativisme culturel rampant qui domine souvent au nom d’une tolérance mal comprise… il faudra lutter contre ces sirènes… et je crois que la candidate en est capable.

Troisième conviction: l’identité collective n’est pas une forme fixe, définissable, transmissible, intouchée entre générations. Elle est toujours entrain de se construire, dans un creuset virtuel avec l’apport des autres, de l’étranger. L’identité individuelle n’est pas non plus pensable sans le recours à autrui… C’est le mélange et la confrontation d’idées et de techniques qui permettent la création de points nodaux d’identités collectives variables au cours du temps. Je fais confiance à la candidate pour arrêter un jeu dangereux qui fait de la recherche d’une identité nationale FIXE à la fois un élément du relativisme culturel et un terreau pour le racisme, l’inégalité et l’exclusion… Rompant avec les représentations archaïques, l’idée fait son chemin qu’une femme a le droit et la capacité de représenter les hommes et les femmes tout comme un homme l’a de droit naturel. Sous cette dernière forme, c’est à la fois la valence différentielle des sexes, le relativisme culturel et le refus de l’égalité dans la toute première altérité qui se manifestaient… Penser qu’une femme est digne de son pays au plus haut point de l’Etat, c’est entrer résolument dans le monde nouveau.

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